Jour 5 - San Miguel

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Je reprend notre arrivée de la veille, de nuit, avec le GPS nous indiquant très précisément notre “eco-lodge” au milieu de la route où passent régulièrement de gros trucks américains, entre une station service et un bar resto bouis-bouis. Un brin décontenancés, on s’enquiert donc de la situation auprès du gérant qui s’avère être le papa de Jorge, notre hôte. Il nous indique alors le petite route cabossée à l’arrière du resto qui conduit au domaine. Arrivés, on est accueilli très chaleureusement par Jorge, un jeune d’une vingtcinquaine d’années, avec un anglais wall street impeccable. Il nous fait visiter la ferme, avec en premier lieu une grande bâtisse ouverte des deux cotés, une grande terrasse, à l’intérieur: canapés, bar, coin cuisine, rocking-chair, etc. C’est le coin commun dans lequel on recroise d’ailleurs la famille suisse qui nous avait indiqué le resto à Tortugero, ils sont cools et on rigole ensemble. Les bungalows sont un peu plus bas dans un jardin que l’on sent même de nuit être une furie : même de nuit tout est vert ! Après installation rapide, on remonte manger au resto du papa.

Le matin c’est grasse mat avec un lever presque à 6am. Le coin est vallonné, vert, vert et vert, des dizaines de nuances. Il y a un cheval blanc et en contrebas, des vaches qui paissent avec de l’herbe jusqu’au ventre. Il y a des oiseaux partout, ca piaille à qui mieux-mieux. Il y a des bruits de disqueuse (des cigales ?), des cliquetis (des toucans ?), des coups de pétard (genouilles ?). On entend même quelques singes hurleurs (ceux qui hurlent, si vous avez suivit) au lointain. On part direct en balade dans la jungle en contrebas, en commençant par un chemin … creusé à la pelle. La terre est parfois rougeâtre. On se perd un peu mais on débouche quand même au bord d’une rivière un peu en amont d’une bâtisse dont on aporendra plus tard qu’il s’agit d’une centre hydroélectrique en construction. On remonte retrouver les filles qui se dorent autour de la piscine. L’eau est froide car il s’agit de celle de la source. Elle est emmenée en continue par un gros tuyau qui descend de la montagne, pas de produit, pas de lagune, pas de pompe nous expliquera Jorge. On remonte déjeuner et on cause avec lui un long moment. C’est un bavard quatre étoiles: il nous raconte tellement de choses. En vrac: la gestion de son affaire avec parents, frères et sœurs, résolument tournée vers le tourisme écolo. Il parle des vaches, des différents bassins à poissons nourris chacun de différents types de compost, des maisons voisines gérées par une Espagnole qui avait confié la garde à deux gars sans papier dont l’un, saoul, a shooté l’autre à coup de fusils, mais qui s’est remis et en a profité pour voler les portes et les fenêtres. Il raconte les tremblements de terre, fréquents, dont un assez violant en 2019 a découpé le sol et abîmé des maisons. Il parle encore des entrepreneurs plus bas venant installer de grosses machines pour exploiter les rochers et détruise l’équilibre local. Il raconte ses projets pour proposer des logements plus bas dans la forêt afin de faire passer la nuit dehors aux touristes. Il parle génétique des vaches pour qu’elles s’adaptent mieux aux pluies et à l’humidité sans perdre leur lait. Il parle et raconte encore ses rêves de maisons à flanc de vallons un peu plus bas. Il a une approche réfléchi et argumentée de l’écologie intégrée aux activités économiques, toujours avec une notion d’équilibre. On est à cent milles lieux de nos pseudo-écolo ésotériques Français. Son téléphone fait à intervalles réguliers le bruit de r2d2 dans Star Wars à chaque fois qu’il reçoit une notification. Il nous conseille ensuite une balade avec différents spots proches de pont passant au dessus de rivières. On profite d’un moment où il reprend sa respiration pour foncer balader vers les coins susmentionnés.

Au pont susdit, entouré de jungle, on décide de descendre pour remonter la rivière (si ça se fait même si c’est un peu technique). Les abords sont escarpés, verts, et s’élèvent assez haut vers le ciel. Tout est couvert de végétation tropicale et on a des points de vue digne d’Indiana Jones, la rivière sous les pieds, les collines vertes de tous côtés et le ciel bleu au loin en point de mire. On se baigne dans l’eau froide en guettant la pluie qui finalement ne vient pas. On prend ensuite un autre chemin, une route un peu défoncée qui monte dans la colline, toujours au milieu de la forêt. En haut, on s’arrête pour laisser transverser un énorme … boa. Un boa constrictor, sa mère ! Il traverse peinard, et on préfère arrêter les voitures de peur non pas de l’écraser mais d’abimer la calandre. Il n’est pas ultra pressé le bougre, on a tout le loisir de le filmer sous toute les coutures, mais pas de trop près tout de même. Au retour, la vue surplombant les vallées est juste incroyable, c’est vallonné et vert où que portent les yeux, au loin la brume se confond avec le ciel. C’est un bon chouette coin, le Jorge nous l’avait décrit comme étant le lieu bier-sunrise d’avec ses frères.

On rentre ensuite prendre un casse-dalle (chez poulet-land), ce doit être pas loin de 15h, on est un peu à la ramasse concernant les horaires. On dit au revoir à Jorge et c’est repartit pour la route. Le paysage change alors un peu, en particulier la terre se rougit. On roule max à 40-50 kmh. Les filles entament un karaoké qui durera jusqu’à l’arrivée. Les routes se cabossent pas mal vers la fin et on parvient au logement à Rio Celeste.

C’est rigolo, une unique chambre en bois pour tout le monde, avec un énorme lit à baldaquin au centre, encerclé comme des douves par des rideaux anti moustique colorés. Tout autour de cet îlot central, des lits (doubles et simples), un coin cuisine, un coin salle de bain. Certains sont un peu claqués et ronquent presque instantanément sur le canap. De mon côté, j’essaye de gérer le retour de Margot qui doit décoller de San Jose le surlendemain à 8h du mat. Ce n’est pas si loin (200 km ?), mais les trajets sont en fait assez longs et on ne trouve pas de bus aux bonnes horaires (2 par jours). J’envoie deux cents milles messages WhatsApp. On tient finalement une piste, par un espèce de shuttle privé qui coûte une blinde et qu’on finalisera le lendemain. On s’endort avec la forêt du pays de Jorge dans la tête. Il cherchent des volontaires pour l’aider dans son affaire, si ça vous tente ! 

 

(Note: toutes les photos sont visibles sur ce lien...)

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